Archives de : mai 2010

Réquisitoire de Pierre Desproges contre Haroun Tazieff

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Et bien Mon­sieur le pré­sident, mes­dames et mes­sieurs les jurés, sis­mo­logue chéri, à aucun titre l’homme qui est devant vous aujourd’hui ne mérite votre clé­mence. Certes, il m’est fort pénible de par­ler ainsi d’un homme qui pour­rait être mon arrière-arrière-arrière grand-père, mais la délin­quance du troi­sième âge doit être répri­mée avec autant de vigueur que celle du pre­mier. Après tout qui est Haroun Mazieff ?

D’abord nous l’avons vu ce n’est pas un vrai fran­çais. Il est né en Pologne, pays d’ivrognes et de com­mu­nistes, patrie de Cho­pin pour ne pas dire de cho­pines. Et je le dis sans xéno­pho­bie aucune, d’ailleurs la répu­blique n’est pas raciste, sur­tout avec les bougn…, n’est pas raciste. Mais enfin, on dit bien saoul comme un Polo­nais, alors que per­sonne ne dit saoul comme un Fran­çais. CQFD. C’est donc han­di­capé par une héré­dité éthylico-slave ter­ri­ble­ment char­gée que le jeune Laurent Tazieff, entre dans (Claude Vil­lers : Haroun Tazieff) …Haroun Machin entre dans la vie le 11 mais 1914 et trois mois plus tard c’est la guerre. Coïn­ci­dence diront les naïfs. Mais moi mes­dames et mes­sieurs les jurés, je le dis tout haut : c’est de la sor­cel­le­rie. À l’âge des couches, le petit Roland Ter­zief pac­ti­sait déjà avec le diable. Le diable qui comme par hasard habite les entrailles de la Terre, c’est-à-dire le fond bru­lant du mor­tel abîme, où s’agite sans repos les dam­nés de la terre, j’ai nommé l’Enfer, mes­dames et mes­sieurs les jurés.

L’enfer qui est au fond de l’Etna,  du Vésuve, du Titi­ca­ca­po­po­ca­te­pelt etc,etc.

Comprenez-vous main­te­nant pour­quoi Haroun Tazieff fut si tôt pas­sionné de vol­ca­no­lo­gie ? Vous me direz, pen­dant qu’il fait ça il est pas au bis­trot, certes. Mais tout est dia­bo­lique dans cet homme, mes­dames et mes­sieurs les jurés.Tout, tout, tout bidou, bidou ! Tout ! Jusqu’à sa voix sombre et téné­breuse et à son accent rocailleux anti-clérical qui ne vise qu’à paro­dier gros­siè­re­ment le char­mant accent bour­gui­gnon de la plus haute som­mité de l’Église de France, l’Ayatollah Ben Marty, Arche­vêque du Tout-Paris.

Dia­bo­liques aussi ses épou­van­tables pré­dic­tions que Gon­zague Tazieff assène sans répit à ses contem­po­rains. Entre ce soir et un siècle Nice subira un choc des­truc­teur, a-t-il lancé récem­ment dans une émis­sion stu­pide de Claude Vil..heu..du Mas­sif Cen­tral, sur France-Inter.

Depuis cette date les Niçois évi­dem­ment ne peuvent plus trou­ver le som­meil.  Et croyez-vous que cet homme leur a demandé par­don aux Niçois qui mal y pioncent ? Que nenni ! Dia­bo­liques encore, ces équi­pées noc­turnes de l’accusé à Lis­bonne où des témoins dignes de foi l’ont vu voler la lave entière du Por­tu­gal. Et tape ! Et tape ! Dia­bo­liques tou­jours ses épou­van­tables orgies de Lis­bonne, au pied du Vésuve, au cours duquel l’accusé, au rythme endia­blé des bala­laï­kas ibé­riques, met­tait enceintes les por­tu­gaises ensa­blées, d’où son sur­nom infa­mant d’Haroun ze Cloque.

Et savez-vous seule­ment mon­sieur le Pré­sident Cen­tral ce que,..Excusez-moi.. Savez-vous seule­ment mon­sieur le Pré­sident ce que l’accusé Gérard Cra­zieff, ici pré­sent, savez-vous ce qu’il fait des mil­liards de Francs suisses qu’il gagne en gre­nouillant dans nos cra­tères ? Il finance des films por­no­gra­phiques pour d’autres vieillards aussi lubriques que lui, sous le cou­vert d’adapter Jules Verne. Oui, par­fai­te­ment ! C’est ainsi qu’il vient de pro­duire une oeuvre infer­nale qu’il a osé bap­tisé «Vingt-mille vieux sous mémère». Je demande contre Mon­sieur Tazieff la peine de mort par immer­sion dans cin­quante kilos de lave en fusion, avec sel, poivre, un oignon piqué de clous de girofles, une branche de lau­rier, un peu de thym, sel, per­sil, thym, lau­rier. Miam. C’est très très bon.

J’ajouterai que s’il se sauve faites reve­nir avec deux-cent grammes de beurre.

La véritable histoire des Alcooliques Anonymes

Des fon­da­teurs ano­nymes[1]

Deux vrais ano­nymes, à tel point qu’il est impos­sible de savoir s’ils sont alcooliques.

Qui connait William Grif­fith Wil­son et Robert Hol­brook Smith ? Per­sonne. Pour vous comme pour la majo­rité des gens ce sont sim­ple­ment deux ano­nymes. Mais pas n’importe quels ano­nymes puisqu’ils sont les deux pre­miers  Alcoo­liques Ano­nymes, enfin ceux du mou­ve­ment né en 1935, qui est le sujet du pré­sent article, pas dans l’absolu, même si mal­gré d’importantes recherches his­to­riques, on ne sait pas qui sont les pre­miers alcoo­liques de l’histoire de l’humanité on peut aussi affir­mer qu’ils étaient ano­nymes. Mais c’est une autre histoire.

Le mys­tère d’un ren­contre dévoilé

Le mys­tère d’une rencontre

De la créa­tion des AA par Bill Wil­son et Bob Smith on ne sait pas grand chose. Ils sont res­tés très dis­cret toute leur vie. Ils évoquent une ren­contre for­tuite dans un bar et l’idée d’arrêter de boire et de fon­der les AA. Ce qui nous sem­bla un peu maigre, et pour tout dire sus­pect, car si l’anonymat reven­di­qué incite à la dis­cré­tion, il est tout aussi légi­time pour vous et moi, de vou­loir en connaître les détails les plus juteux et crous­tillants. C’est dans cette optique que je me suis lancé dans un tra­vail de d’enquête impor­tant, alliant recherche biblio­gra­phique dans les archives des jour­naux locaux et natio­naux de l’époque, ainsi qu’un tra­vail d’investigation de dix ans sur le ter­rain. Ce tra­vail m’a per­mis de per­cer le mys­tère de la créa­tion d’un groupe décliné sur les cinq ou six conti­nents selon que l’on consi­dère l’Amérique du Sud et l’Amérique du Nord comme un unique continent.

La ren­contre

Ren­trons dans le vif du sujet. Bill Wil­son et Bob Smith se ren­con­trèrent au bar de l’hôtel Johnny Wal­ker a Vol­ney dans le Wis­con­sin. L’un est doc­teur, l’autre repré­sen­tant de com­merce. Dés­œu­vrés, ils se lient d’amitié et com­mencent à dis­cu­ter, ce qui arrive fré­quem­ment dans les films mais très rare­ment dans la vie. Bill vient de réus­sir à four­guer un aspi­ra­teur à une simple femme avec contrat de main­te­nance sur 20 ans, les 591 volumes de la Désen­cy­clo­pé­die Uni­ver­si­las avec paie­ments pro­gres­sifs éta­lés sur 30 ans, assor­tis d’une assurance-vie, et d’un cré­dit éta­lés sur 70 ans. Il veut légi­ti­me­ment arro­ser ça, alors il paye tour­née sur tour­née. Quand au doc­teur Bob Smith, il fête la sur­vie du patient qu’il a opéré l’après-midi même de l’appendicite ce qui ne lui était pas arrivé depuis 5 ans au moins, date de ses pre­mières crises de Déli­rum Tre­mens. Bref, Bill et Bob sont de joyeuse humeur alors qu’il ter­minent leur quin­zième tour­née devant inter­rompu en rai­son de la fer­me­ture du bar. Le bar­man Mario Andretti, qui nous a per­mis de recons­ti­tuer cette scène nos raconte qu’il les a vu par­tir s’appuyant l’un sur l’autre et dis­pa­raître dans les cou­loirs de l’hôtel

« Je les ai vu par­tir s’appuyant l’un sur l’autre et dis­pa­raître dans les cou­loirs de l’hôtel. »
Mario Andretti à pro­pos de Bill Wil­son et Bob Smith

le mys­tère

Le len­de­main, Mario voit appa­raître Bill la mine bla­farde et l’air soucieux.

« Je vois appa­raître eul’Bill la mine bla­farde et l’air sou­cieux. J’lui dit comme ça, «Z’avez un peu abusé hier ! Pas facile eul’réveil, hein ?» La d’ssus, v’là qu’le gars m’tombe dans les bras en chia­lant. »
Mario Andretti à pro­pos de Bill Wilson

Quand à Bob Smith, c’est le témoi­gnage du récep­tio­niste Jan Kula­sek (c’est un pseudo, il a désiré gar­der l’anonymat) qui nous éclaire.

« Je vois M’sieur Bob s’approcher de mon comp­toir la mine toute grise (piss’que cet enfoiré de Mario a déjà dit qu’elle était bla­farde à pro­pos de m’sieur Bill) pour r’prendre sa clef. J’lui lance : «Z’avez grise mine m’sieur Bob» et m’sieur Bob y m’répond : «Je m’sens tout mer­deux». Alors, en rigo­lant, j’réponds «Pour­quoi ça m’sieur Bob, vous avez enculé quelqu’un ?». Et le v’là qui m’tombe dans les bras en pleu­rant (piss’que cette ordure de Mario a déjà dit chia­lant) »
Jan Kula­sek à pro­pos Bob Smith

Que s’est-il donc passé cette nuit-là ? Si les témoi­gnages nous offrent un début de piste il nous a sem­blé néces­saire de pous­ser bien  au fond nos investigations.

Le mys­tère dévoilé

Dans notre quête de la vérité, nous sommes tom­bés sur un fait divers reporté simul­ta­né­ment dans La Gazette de Vol­ney et le Herald Tri­bune datés du 10 juin 1935, sous «Tapage noc­turne into­lé­rable à l’Hôtel Johnny Wal­ker de Vol­ney. Mal­gré la gène occa­sion­née, les forces de l’ordre refusent d’intervenir. Mais que fait la police ? «. Intri­gués nous nous sommes ren­dus au poste de police de Vol­ney afin de consul­ter le registre des plaintes. Un telle coïn­ci­dence piqua notre curio­sité et nous avons eu accès aux registre des plaintes de la polices. Effec­ti­ve­ment une plainte est enre­gis­trée à la date du 10 juin 1935 à 02h34, indi­quant des hommes hur­lants dans une chambre d’hôtel. Nous avons retrouvé l’agent qui a pris l’appel. Il témoigne

« J’ai bien reçu ce coup de fil. J’ai demandé au type au bout du fil de me dire en gros ce qu’il enten­dait. Quand il m’a répondu, je lui ai dit qu’on allait pas se dépla­cer pour deux pédés qui s’enculent. »
Frank Dre­bin à pro­pos du coup de fil du 10 juin 1935 à 02h34

. Tou­jours ce même 10 juin 1962, Bill et Bob déci­dèrent ensemble de ne plus tou­cher à une goutte d’alcool et fon­dèrent les AA.

Des débuts dif­fi­ciles

Repro­duc­tion d’un bul­le­tin d’un alcoo­lique pas si anonyme.

On com­prend mieux désor­mais l’idée de base des AA qui incite les gens à prendre la parole pour décrire ses expé­riences mal­heu­reuses décou­lant de l’alcoolisme mais à la condi­tion de res­ter ano­nyme et sur­tout de ne rien répé­ter à per­sonne[2] . Les règles elles aussi ont évo­lué. Si aujourd’hui les per­sonnes doivent être dans une réelle volonté d’abstinence, ce cri­tère était option­nelle à la créa­tion des pre­miers  groupes, comme le montre le bul­le­tin d’inscription repro­duit ci-contre qui insis­tait for­te­ment sur l’alcoolisme et l’anonymat. La volonté d’arrêter fut impo­sée après le pas­sage d’un ano­nyme deve­nue célèbre.

Un ano­nyme devenu célèbre

En effet dans nos recherches actives nous ont per­mis de décou­vrir que Charles Bukowski fit par­tie un temps des AA. Nous avons là aussi le recou­pe­ment des témoi­gnages nous ont per­mis de recons­truire les cir­cons­tances dans les­quelles l’écrivain amé­ri­cain y par­ti­cipa. Sur le point de vue de l’anonymat, Bukowski n’était connu à l’époque (il avait 18 ans) et alcoo­lique depuis l’âge de 14 ans, il fut donc accepté de bonne foi mais avec un foie déjà en pitoyable état. Les règles n’ayant pas été com­plè­te­ment éta­blis, Bukowski per­mit par sa par­ti­ci­pa­tion d’en éta­blir cer­taines. S’il n’était effec­ti­ve­ment pas obli­ga­toire d’être sobre pour par­ti­ci­per, il n’était pas non inter­dit d’y appor­ter à boire. Ce dont Bukowski ne s’est pas privé mais qui fut rapi­de­ment inter­dit. Par la suite, on conseilla à Bukowski d’essayer d’être sobre avant les séances. Ce qu’il fit de même, mon­trant ainsi qu’il était sur le bon che­min (alors que Kerouac était déjà Sur la Route). Ses proches racontent même qu’il ne com­men­çait à boire qu’à 18h30 soit plus d’une heure après son réveil. Mais fina­le­ment ce sont les témoi­gnages de Bukowski qui cau­sèrent le plus de dégâts dans les rangs des AA. Écou­tant les récits sor­dides de Bukoswki, réels ou consé­cu­tifs à ses délires, ses com­pa­gnons étaient de plus en plus nom­breux à se remettre à boire. Nous avons retrouvé cer­tains témoins encore aujourd’hui alcooliques.

« J’avais arrêté de boire depuis 10 ans déjà, j’étais tel­le­ment fier. Il a suffi d’un séance avec Bukowski pour que je replonge. »
Yvon Gat­taz à pro­pos de Bukowski.

Suite aux défec­tions qui se fai­saient de plus en plus nom­breuses, Bukowski fut exclu et décida de mettre par écrit ses récits plu­tôt que de les racon­ter à une bande d’anonymes. À défaut de renon­cer à l’alcoolisme, il renonça à l’anonymat. Il rend d’ailleurs un hom­mage aux AA, avec son style poé­tique inégalable.

« Je ne remer­cie­rai jamais assez les AA, c’est grâce à eux que je suis passé de la bibine au pinard. »
Bukowski à pro­pos de Bukowski comme souvent

Les Alcoo­liques Célèbres

« Ich Bin ein Ano­ny­mer ! »
John Ken­nedy tam­bou­ri­nant à la porte d’une réunion.

Ce genre d’attitude repro­dui­sant en public les pra­tiques internes des AA est for­te­ment réprouvée.

Depuis le début, la charte des AA est très poin­tilleuse sur l’anonymitude des par­ti­ci­pants. Même si elle ne rejette pas d’emblée la par­ti­ci­pa­tion de célé­bri­tés, leur par­ti­ci­pa­tion est sou­vent dif­fi­cile car par défi­ni­tion la célé­brité s’accommode mal de l’anonymat. C’est la rai­son pour laquelle bien sou­vent les vedettes réels ou vielles gloires, ne sont géné­ra­le­ment pas accep­tées. C’est en réac­tion à ce rejet, que s’est créé le groupe des Alcoo­liques Célèbres qui tenait ses réunions au Palace.À  leur cré­dit, il faut sou­li­gner que la plu­part des par­ti­ci­pants arrê­tèrent de boire. Pour se mettre à la cocaïne pour la plu­part, certes, mais c’est un suc­cès mal­gré tout.

Pour­tant on note mal­gré tout ça et là quelques excep­tions, si la célé­brité exprime et joue à fond la carte de l’anonymation.

« Alors, ça, je vous assure que je sors bien d’un réunion avec Vla­di­mir P. et pas d’une réunion des AA. »
Nico­las S.

C’est d’ailleurs dans cet esprit que suite au résul­tat des élec­tions euro­péennes de 2009, que les AA ont fait savoir qu’ils accueille­raient sans réserve Mar­tine Aubry, ainsi que la plu­part les socia­listes qui sont de plus en plus ano­nymes. Mais tout ça n’a plus vrai­ment grand chose à voir avec l’histoire de Alcoo­liques Ano­nymes mais plu­tôt à la recherche du socia­liste perdu.

Notes :

[1] Ce billet fut ori­gi­na­le­ment publié sur le site de la Désen­cy­clo­pé­die

[2]  Et ça marche. Car si les par­ti­ci­pants aux AA avaient été un peu moins ano­nymes et plus loquaces, j’aurais évité d’engloutir mes pauvres éco­no­mies dans cette putain d’enquête.

Inédits de la correspondance entre Musset et Chopin révélés par Pierre Desproges

Ces lettres ont été lues par Pierre Des­proges le 4 novembre 1982

J’ai jus­te­ment sous les yeux le texte inédit de la lettre boul­ver­sante et tout à fait confi­den­tielle dans laquelle Alfred de Mus­set décrit à Fré­dé­ric Cho­pin les pre­miers ins­tants de son idylle farouche avec George Sand : 

Paris, ce 14 mars 1831. 
A.M./P. [A.M. = Alfred de Mus­set. P. désigne évi­dem­ment l’initiale de Patri­cia, la secré­taire de Musset]

Objet : de convoi­tise
Des­ti­na­taire : Fré­dé­ric Cho­pin, 17 impasse Jaru­zelki, Varsovie

Mon­sieur, 
Suite à notre entre­tien du 11 cou­rant, j’ai l’honneur de vous faire connaître par la pré­sente l’émoi où mon coeur est plongé. Cepen­dant la nature et l’objet des rap­ports qui nous lient vous et moi dans l’affaire Sand ne m’autorisent pas plus que d’obligation de réserve à laquelle nous sommes tenus d’envisager dès aujourd’hui de révé­ler au grand jour les éven­tuels déve­lop­pe­ment blen­nor­ra­giques de cette affaire. 
Veuillez agréer, mon­sieur, l’assurance de mes sen­ti­ments roman­tiques. Tu as le bon­jour d’Alfred. 

Plus bou­le­ver­sante encore est la réponse de Cho­pin à Mus­set, en date du 31 mars, dans laquelle le com­po­si­teur raconte à son ami son entre­vue sen­ti­men­tale avec la même George Sand : 

E.C./P. [P désigne l’initiale de Patri­cia, Mus­set et Cho­pin par­ta­geaient aussi leur secrétaire]

Cher Mumu,
Pom, Pom, Pom, Pom. Dieu soit béni. J’ai tenu Aurore dans mes bras. [Aurore Dupin, bien entendu, Aurore étant le pré­nom à l’état civil de George Sand. Moi-même, que je vis avec un nègre, je me fais appe­ler Ingrid, ça l’excite.]
Ma joie est grande, cher Alfred. Ima­gine la scène. Il est près de minuit. Aurore est pen­chée à la fenêtre sombre où l’intensité de la nuit nous serre le coeur. Son cou ado­rable me ren­voie la lueur de la chan­delle que je porte vers elle. Elle se tourne enfin. Je lui fait pouët-pouët, elle me fait pouët-pouët, psi ça y est.