Alors que je viens de terminer le Radeau de Pierre de José Saramago où l’on suit les les pérégrinations d’une bande de personnages à la dérive à l’intérieur de la péninsule ibérique qui se détache des Pyrénées et elle-même à la dérive entre Europe et Amérique, je me faisais la réflexion suivante, Comment écrire sur Saramago ?
Question facile pour Zemmour qui répondrait certainement quelque chose du genre, C’est un utopiste qui se sert d’image cul-cul pour propager ses idées mielleuses de gauche et sert de caution à la gauche anti-mondialiste, En plus il utilise mal la ponctuation et puis il n’est même pas français, Et toi le Père plus tellement désoeuvré t’arrête de ponctuer comme Saramago, les points d’exclamations, les points et les majuscules c’est pas pour les chiens.
Quant à Naulleau…Allez ne perdons pas de temps.
En tout cas la première chose à éviter si on veut parler de Saramago c’est d’évoquer ces deux sous-clowns.
Pour en revenir au sujet qui me préoccupe l’âme, comment donner l’envie de lire Saramago. Car c’est ce qui compte, quand on aime quelque chose, on a envie de le faire aimer chez les autres où au pire s’assurer que certains détestent ce que nous aimons, comme la foi où j’exultai lorsque je lus que Finkielkraut n’aimait pas beaucoup Desproges. Un grand moment de joie, mais voilà que je me mets à parler de l’apologiste du viol sur mineur.
Donc, je disais que lorsque l’on aime quelque chose on a envie de le partager avec ceux que l’on aime, mais la lecture a ceci de particulier qu’elle est d’abord un plaisir solitaire, contrairement au théâtre au cinéma s’exerçant en public et donc immédiatement partagés. Mais bien que plaisir solitaire, on a malgré tout envie de le partager, ce qui entre parenthèse différencie la lecture de la masturbation qui pour agréable qu’elle soit donne rarement l’envie de partager.
Comme souvent chez Saramago, on part d’une idée originale originale voire loufoque : la péninsule ibérique à la dérive, une épidémie de cécité, une épidémie de votes blancs, Jésus raconté par Jésus, etc. L’histoire est souvent simple à décrire, mais comment rendre compte de tout ce qui n’est pas l’histoire ? Comment rendre compte du style sarameguesque (que je préfère à saramaguien) en évitant le genre de néologismes affreux que je viens de commettre à l’instant.
Comment rendre compte de ces petites vérités assénées au détour d’un phrase ? Et la quasi-absence d’expressions toutes faites du genre au détour d’une phrase
? Des interventions du narrateur, pour dire ce qui pourrait raconter mais qu’il ne va pas faire mais qu’il raconte quand même ? Comment expliquer que l’on est même pas fâchée d’être obligé d’aller chercher le dictionnaire pour chercher des mots compliqués qui apparaissent ici ou là ? Comment décrire ces dialogues fictifs dans la fiction que Saramago se plait à parsemer ses récits ? Parler de la passion (que je ne partage pourtant pas) que l’auteur éprouve pour les chiens, qui apparaissent dans chacun de ses roman ? Comment faire comprendre qu’à force de lire ses livres on s’habitue et on recherche ces choses qui ne font pas partie de l’histoire mais font partie de Saramago ?
On peut toujours essayer des phrases du genre : je me suis tapé un bon Saramago hier soir, c’était bon. Mais les possibilités de convaincre sont moindres. Le recours à la torture quant à lui risque d’être contre-productif. Je ne peux pas non plus parler des raisons qui m’ont poussé à lire Saramago, à part une légère fierté de lire le seul Portugais couronné d’un prix Nobel. Le prix Nobel de Littérature n’étant en général pas attibué à des imbéciles, puisque qu’Albert Camus, l’a obtenu, n’en déplaise à Siné, qui ne lui pardonne pas de ne pas avoir choisi le même camp que lui lors de la guerre d’Algérie car Camus voyait les choses en gris et non pas en noir et blanc. Mais non je ne vais pas parler de ce vieux con sénile de Siné, non plus.
Le plus approprié me semble de conseiller de lire un livre. Mais lequel ? Je suis entré dans Saramago (c’est un expression, hein, malgré toute la sympathie et l’immense respect - assez proche de la dévotion je l’admets — la gérontophilie ne fait pas partie de mes perversions pourtant nombreuses) après L’Aveuglement (Ensiao sobre a ceigueira) et j’ai ensuite enchaîné avec La Lucidité (Ensaio sobre a lucidez) et j’ai continué.
Je pourrais donc proposer la même chose, mais L’aveuglement est le livre le plus noir et le plus pessimiste que j’ai lu de lui, La lucidité est plus drôle et jubilatoire mais il s’inscrit dans la continuité du premier; Il y a bien, Tous les noms, La Caverne ou l’Histoire du Siège de Lisbonne mais ils sont plus Portugais
et sans doute moins accessible au premier abord.
Finalement aujourd’hui je conseillerais de lire le Radeau de Pierre . L’histoire démarre dans les Pyrénées Orientales à Cerbère où les chiens se mettent à aboyer le jour ou les Pyrénées se fendent en deux transformant la péninsule en radeau (d’où le titre). Le livre date de 1986 peu avant l’entrée de l’Espagne et du Portugal dans la CEE et Saramago y expose dèjà ses doutes sur l’Europe que souhaitent tant joindre le peuple portugais. Ses craintes sont aujourd’hui confirmées.